Train World : cinq ans de factures fantômes et un million envolé dans les machines à sous

En Belgique, la SNCB affronte sa plus grosse affaire de fraude interne depuis une décennie. Une ex-comptable de Train World, le musée ferroviaire de Schaerbeek, a reconnu avoir détourné 1,06 million d’euros entre 2016 et 2021 pour financer une addiction au jeu. L’ampleur du siphonnage – près de 20 % du budget annuel du musée –, sidère les enquêteurs.

Elle dépensait plus de 200 000 € par an dans les machines à sous…

Chargée de la facturation, l’employée éditait de faux bons de commande pour du nettoyage ou de la communication. Les « prestataires » n’existaient pas ; le numéro IBAN figurant sur chaque facture était tout simplement le sien. En moyenne, 200 000 € transitaient chaque année vers son compte personnel, sans qu’aucun supérieur ne valide la dépense. « Personne ne m’a jamais contrôlée. J’étais responsable de A à Z », a-t-elle avoué après coup, affirmant n’avoir « pas profité » de l’argent, lequel a pourtant été englouti dans les casinos et les sites de paris.

La supercherie n’est apparue qu’en mars 2021, lors de la clôture comptable suivant son départ à la retraite. Comment un cinquième des frais de fonctionnement a-t-il pu disparaître sans alerter ? « L’absence totale de séparation des tâches et d’audit de routine a ouvert un boulevard », observe un expert en gouvernance publique. L’affaire a déclenché un audit interne généralisé ; la SNCB assure avoir depuis « renforcé les contrôles » et intégré ses filiales, dont l’ASBL Train World, au périmètre de vérification centralisée.

L’angle mort de l’addiction au jeu, et une leçon de vigilance !

Poursuivie pour faux, usage de faux et escroquerie, la fraudeuse a été condamnée en mars 2023 à restituer la totalité du préjudice. « Une partie substantielle a déjà été récupérée, le solde fera l’objet de saisies sur pension », précise la compagnie ferroviaire. Aucun licenciement disciplinaire n’a, pour l’heure, été annoncé parmi les cadres qui validaient les bilans.

En Belgique, près de 380 000 adultes sont classés « joueurs à risque », et plus de 100 000 d’entre eux présentent un usage excessif des jeux d’argent, selon le Conseil supérieur de la santé.  L’Organisation mondiale de la santé reconnaît depuis 2018 le jeu pathologique comme trouble mental. « Le joueur ne détourne pas seulement des fonds, il détourne sa propre volonté », rappelle la psychologue Isabelle Deflandre, qui plaide pour un dépistage systématique dans les entreprises financières.

Pour la SNCB, le scandale sonne comme un rappel brutal : la confiance ne dispense jamais du contrôle. Les syndicats réclament la publication complète de l’audit et la nomination d’un responsable à la conformité indépendant. Quant aux visiteurs de Train World, ils devraient continuer à admirer locomotives et wagons historiques sans percevoir la moindre secousse, bien que les coulisses, elles, viennent de dérailler…

Dernière édition: 27/05/2025

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